Babacar

Le 1er décembre à Rennes, Paris, Angers, Lyon, Marseille …

 

Dans la nuit du 3 décembre 2015, Babacar a été tué de 5 balles dans le corps par un membre de la Brigade Anti-Criminalité (BAC) de Rennes alors qu’il était chez des amis. Vers 4h du matin, Babacar a eu une crise d’angoisse, et son ami a appelé les secours afin de pouvoir le prendre en charge. Sauf que cette nuit-là, ce sont 8 policiers qui arrivent dont 4 agents de la BAC, armés de tasers, de matraques télescopiques et d’armes létales, et qui interviennent.a

 

Aujourd’hui, toujours en lutte

Depuis, notre Collectif Justice et Vérité pour Babacar s’est constitué autour de sa sœur, Awa, avec des proches et des soutiens. Des zones d’ombres et des incompréhensions subsistent depuis la mort de Babacar. L’instruction judiciaire n’évoluant pas, et face à l’inefficacité des deux précédents avocats, Awa décide de nommer une nouvelle avocate. Grâce à Maître Tenier, de nouveaux éléments d’enquête ont pu être demandés auprès de la Juge d’instruction. Nous attendons maintenant les conclusions de l’enquête.

 

Nos objectifs

Si nous appelons chaque début du mois de décembre à nous réunir, c’est pour se souvenir, et lutter. Les deux ne sont pas opposés. On lutte pour ne pas oublier : se souvenir c’est déjà résister à l’écrasement face aux institutions et à la propagande médiatique. Chaque événement est l’occasion de raviver la mémoire collective autour de Babacar et de rappeler qui sont les coupables – qui n’étaient pas en état de légitime défense. C’est aussi pour nous et nos soutiens, ami·es, proches, camarades de luttes, l’occasion de nous réunir et de nous renforcer dans cette lutte de longue haleine, alors que l’enquête est toujours en cours. Enfin, c’est une occasion de plus de porter un message politique clair : ce crime n’est ni anodin ni le fruit du hasard, il est à appréhender comme une illustration du racisme systémique et du rôle de la police. Cette année, nous avons pris la décision d’ancrer notre événement annuel de début décembre dans le quartier où Babacar a été tué. Quartier populaire où les violences policières, les inégalités raciales et sociales sont vécues quotidiennement.

 

Comme beaucoup d’entre vous le savent, le vendredi 30 novembre et le samedi 1er décembre 2018 sont deux jours particuliers cette année. Le vendredi correspond à l’appel du Collectif Rosa Parks à disparaître des lieux d’étude, de consommation, des réseaux sociaux, des lieux de travail… Le samedi 1er, ce même collectif appelle à réapparaître, « plus beaux, plus visibles, plus déterminés que jamais pour exprimer et réaliser nos espoirs de justice et surtout notre refus absolu des inégalités, des humiliations et des guerres, qu’elles soient menées ici contre une partie de la population ou à l’étranger. »

 

A Rennes le 1er décembre, un événement régional pour Babacar et pour résister ensemble

Nous pensons que nos combats se rejoignent et bien plus encore vu que nous sommes dans le même bateau. Ainsi, pour concilier ces événements, nous proposons que les collectifs, personnes, groupes qui sont signataires de cet appel, viennent nous rejoindre à Rennes pour en faire un évènement régional de l’ouest et se solidarisent concrètement autour du combat d’Awa Gueye pour son frère. Donnons-nous les moyens d’apparaître à la fois à Paris et à Rennes, et dans toutes les villes où des événements auront lieu.

2 décembre 2017: 2è marche commémorative pour Babacar

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Avant que ça vous arrive vous pensez que ça ne vous arrivera jamais

Quand ça vous arrive, vous n’y croyez pas

Quand ça vous est arrivé, vous entrez dans une réalité que vous n’auriez jamais dû connaître

STOP AUX VIOLENCES ET AUX CRIMES POLICIERS

3 décembre 2015 : 4h du matin dans un immeuble de Maurepas à Rennes. Une crise d’angoisse, un appel aux secours. 8 policiers arrivent dont 4 agents de la BAC, armés d’un taser, de deux matraques téléscopiques et d’armes létales. En quelques minutes, Babacar Gueye, en pleine crise d’angoisse se mutile avec un couteau,et meurt sous les balles d’un agent de la BAC. 5 au total. Cela fait 2 ans. 2 ans que ceux qui connaissaient Babacar et qui l’aimaient ont rejoint le douloureux combat des familles de victimes de crimes policiers. Babacar avait 27 ans et la vie devant lui.

Ceux qui le connaissaient se souviennent de son sourire, de son rire, de sa sensibilité, de sa bonté, de son amour de l’autre.

Ils savent que si Babacar est mort, c’est parce qu’il était noir, et ils se posent la question : si tout cela s’était passé dans le quartier du Thabor et non dans un des quartiers les plus pauvres de la France hexagonale, que se serait-il passé ?

Ils savent que cette société, où la police tue chaque année 10 à 15 jeunes noirs, arabes et autres non-blancs, ils n’en veulent pas.

Ils savent que personne ne mérite de mourir sous les balles de la police.

Personne.

Ils savent que trop de frères, fils, pères, maris, oncles, neveux, cousins, amis partent trop tôt sans que justice soit faite.

Ils savent qu’aujourd’hui, tout le monde est concerné, car c’est le problème de la société toute entière.

Aujourd’hui, la famille et les amis de Babacar ne lâchent rien. Après 15 longs mois d’attente et la négligence de l’ancien avocat, une enquête a été ouverte en mars dernier.

FACE A LA MORT NOUS SOMMES IMPUISSANTS.

FACE A L’INJUSTICE NOUS SOMMES DÉTERMINÉS

ON N’OUBLIE PAS ON NE PARDONNE PAS

 

100 portraits contre l’état policier, Cases Rebelles

Il n’y a sans doute pas assez de mots pour exprimer nos sentiments devant l’ouvrage du collectif nantais Cases Rebelles. Un simple merci ne suffirait pas. Sortir nos morts de l’oubli est sans doute le combat le plus lourd à porter, au delà du judiciaire, pour des familles et des proches endeuillés. Alors, nous souhaitons longue vie au collectif et un grand merci pour ce travail de longue haleine et imprégné d’amour et de solidarité.

Voici un extrait de leur interview :

« L’oubli permet qu’il n’y ait que des accidents en lieu et place d’une violence systémique qui rejoue l’innocence à chacune des occurrences .

Nous avons voulu à travers le dessin représenter ces âmes de leur vivant. Nous avons pensé les résumés comme autant d’encouragements à en apprendre plus, à faire des recherches, à transmettre. Que ces soifs d’en savoir plus, de creuser, amendent les multiples injustices des versions officielles et de leurs tribunaux. Et que cela génère de la force pour tous les combats en cours.

[…]

Chacune de ces victimes mériterait un livre et une contre-enquête.

[…]

Il ne s’agit pas d’icônes ou de héros mais des figures incontournables des luttes pour un monde plus juste.

Ces portraits réaffirment aussi le caractère sacré de la vie, bafoué par la mort brutale. Ces vies volées ne sont pas seulement les symptômes d’une violence d’État :

il s’agit d’individu·es qui avaient des rêves. Des personnes sensibles qui étaient aimables et aimées. Et ces morts auraient pu être évitées.« 

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Pour se procurer le livre: sur leur site ou sur le site de l’éditeur

A lire aussi l’interwiew sur Quartiers Libres

 

 

Le chemin de Babacar

Cet article est paru dans La Gazette#9, la lettre d’information des Centres Sociaux Rennais, avril 2016

 

« Je m’appelle Babacar,
Je suis sénégalais,
Je suis courageux.
J’ai la peau noire comme le chocolat.
Mes cheveux sont noirs comme la nuit.
J’ai les yeux noirs comme ceux du hibou.
Je suis né il y a 27 ans dans un pays merveilleux.
Pour venir ici, j’ai voyagé longtemps
A pied, en charrette, en voiture, en bateau.
J’ai dû me débrouiller, c’était dur mais je suis resté courageux.
Et me voilà ici. »

Début 2015, tu n’as pas encore tes papiers.

Tu arrives à Carrefour 18, tu veux apprendre à lire et à écrire.

« J’ai le temps, j’ai pas de travail, je veux m’intégrer. »

Aux ateliers de français, tu es assidu, curieux, patient.

« J’apprends vite, je suis motivé. »

On te voit souvent à la cafétéria, à l’Espace-Lecture, aux sorties.

Tu es sociable, tu rencontres du monde.

« J’aime les gens.»

Le vendredi, c’est toi qui installes la sono et animes une demi-heure de l’atelier salsa avec des danses sénégalaises. Tu aimes rendre service.

Puis est venu l’été.

Tu as attendu la rentrée impatiemment.

Ateliers de français, recherches d’emploi, bénévolat, promesses d’embauches, sport, musique, médecin, aide alimentaire, papiers, démarches parfois vaines et fatigantes.

Des portes s’entrouvrent, se ferment, claquent quelques fois.

Tu te décourages.

« J’ai mal à la tête, je dors pas bien, j’en ai marre ».

C’est dur l’impuissance, par moments tu ne sais plus où est ton chemin.

« Je suis un homme, je veux vivre normalement, compter sur moi-même ».

Tu t’accroches, tu vas réussir.

« Ca va aller ».

Tu vas donner des cours de danse sénégalaise à Carrefour 18, dans d’autres associations aussi.

Le 4 décembre ce sera le premier, tu te prépares.

Mais tu n’as pas pu, ton chemin s’est arrêté là.

Babacar Gueye a fréquenté les Centres Sociaux de Carrefour 18, des Champs Manceaux, et de Villejean. Il a été tué par la police le 3 décembre 2015 à Maurepas.